Responsable de l'équipe
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Chloe Zubieta
Tel. : 04 38 78 06 54
Laboratoire Physiologie Cellulaire & Végétale CEA-Grenoble 17 avenue des Martyrs 38 054 Grenoble cedex 9 France
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Membres de l'équipeGUILLOTIN Audrey, Ingénieure d'étude CNRS,
Audrey.Guillotin[@]cea.frHUGOUVIEUX Véronique, Chercheure CEA,
Veronique.Hugouvieux[@]cea.frHUTIN Stéphanie, Chercheur CNRS,
Stephanie.Hutin[@]cea.frJANEAU Aline, Étudiante en thèse,
Aline.Janeau[@]cea.frZUBIETA Chloe, Directrice de recherche CNRS,
Chloe.Zubieta[@]cea.fr
L'équipe
StrucDev se consacre à la découverte des mécanismes moléculaires qui régulent le développement des plantes et leur réponse à l’environnement. Au cours de la dernière décennie, nous avons intégré des approches de biologie structurale et de biophysique afin de révéler comment la structure des protéines, notamment celle des facteurs de transcription et de leurs corégulateurs, influence la régulation des gènes. Nos recherches se concentrent sur des complexes transcriptionnels clés impliqués dans la floraison, le développement reproductif et la perception de la température.
L’équipe a mené des études fondamentales sur le rôle des facteurs de transcription MADS dans le développement floral. Nos travaux pionniers sur ces facteurs ont apporté des éclairages essentiels sur le développement et l’évolution des organes floraux. En plus de poursuivre ces recherches sur les mécanismes moléculaires de la reproduction des plantes, nous avons récemment initié des travaux sur la perception de la température et la séparation de phases liquide-liquide, en adoptant une approche intégrée alliant biologie structurale, biophysique et transgénèse. Ces projets constituent les principaux axes de recherche actuels du laboratoire.

© C. Morel / CNRS
Déterminants structuraux de la fonction des MADS et évolution du développement (évo-dévo)
La morphologie florale est orchestrée par des régulateurs maîtres de l'identité des organes — les facteurs de transcription (TFs) MADS, un axe central des recherches du Dr Hugouvieux. Les TFs MADS sont hautement conservés chez tous les eucaryotes. Une question fondamentale que notre équipe explore depuis plus de dix ans est la suivante : comment ces complexes parviennent-ils à des fonctions régulatrices géniques aussi spécifiques et diverses, malgré une structure de domaine remarquablement conservée — notamment dans leur domaine de liaison à l’ADN ?
© C. Morel / CNRS
Alors que les complexes MADS présentent une affinité différentielle pour l’ADN, les mécanismes sous-jacents à cette spécificité restent mal compris. Pour y répondre, nous avons adopté une approche intégrée structure-fonction. Nos recherches ont démontré que, chez Arabidopsis, l'identité fonctionnelle des complexes tétramériques MADS est dictée par un petit domaine qui régule la spécificité des interactions protéine-protéine au niveau du dimère, ainsi qu’un domaine coiled-coil spécifique aux plantes qui permet la formation de complexes tétramériques de plus haut ordre. Ces interactions influencent la sélection des sites de liaison à l’ADN et l'espacement entre ces sites, déterminant ainsi la fonction du complexe transcriptionnel MADS.
Nos travaux ont permis de mettre en évidence les déterminants atomiques et moléculaires de cette fonction, révélant que la sélection des partenaires protéiques et la formation de complexes transcriptionnels de haut ordre sont essentiels à leur rôle physiologique.
En combinant biologie structurale et approches transgéniques, nous avons apporté des perspectives uniques sur les mécanismes moléculaires de la formation des complexes de TFs durant le développement reproductif des plantes. Cette stratégie intégrative a positionné StrucDev comme un leader dans l’étude de la fonction des facteurs de transcription MADS dans le déclenchement du développement des organes chez les plantes.
© C. Morel / CNRS
Dans le prolongement de ces travaux, nous étudions actuellement la tétramérisation chez les plantes à graines, et explorons si les complexes d’identité des organes mâles et femelles issus d’espèces évolutivement éloignées sont fonctionnellement équivalents. À travers ces recherches, nous visons à révéler les principes fondamentaux qui gouvernent la spécificité transcriptionnelle dans le développement reproductif des plantes.
Figure 1: Les facteurs de transcription MADS forment des complexes tétramériques et déterminent l'identité de l'ensemble des organes floraux. Les modèles de TF MADS sont adaptés de Theißen et al. 2016 (gauche) et Theißen et Saedler 2001 (droite). Les deux modèles ont été produits à l'aide de Biorender.com.
La séparation de phases liquide-liquide comme mécanisme de thermoperception
© C. Morel / CNRS
La dernière décennie a été marquée par une succession sans précédent de records de chaleur, chacune des dix dernières années figurant parmi les plus chaudes jamais enregistrées. En 2024, les températures mondiales ont dépassé le seuil critique de +1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels. En tant qu’organismes sessiles, les plantes perçoivent et réagissent en permanence à de faibles variations de température, ajustant des processus développementaux clés tels que la floraison, la production de graines et l’accumulation de biomasse. Les effets du réchauffement climatique ont des conséquences profondes, mais les mécanismes moléculaires sous-jacents à la perception de la température chez les plantes demeurent encore largement méconnus.
Le Dr Hutin dirige nos recherches sur les mécanismes de thermoperception chez les plantes, en se concentrant sur l’organisation moléculaire et la fonction de EARLY FLOWERING 3 (ELF3), une protéine clé dans la thermosensation chez Arabidopsis thaliana. ELF3 est une protéine majoritairement intrinsèquement désordonnée qui agit comme une plateforme pour la formation du Evening Complex (EC) — un répresseur transcriptionnel composé d’ELF3, de la protéine de liaison à l’ADN LUX ARRHYTHMO, et de la protéine adaptatrice ELF4. De manière remarquable, ELF3 subit une séparation de phases (PS) dépendante de la température, à la fois in vitro et in vivo. Ce phénomène entraîne la dérégulation des gènes cibles du complexe EC, impliqués dans la croissance par élongation et la floraison. Ces travaux constituent l’une des premières démonstrations directes la réponse de la plante à la température via la condensation protéique chez les plantes et posent les bases du champ émergent de la séparation de phases dans ce contexte.
Sur la base de cette découverte, Dr Hutin, accompagné prochainement de doctorants et post-doctorants, explore désormais les dynamiques moléculaires et structurales d’autres protéines, principalement des facteurs de transcription et des régulateurs, capables de subir une séparation de phases. En combinant biologie structurale, biophysique et approches biochimiques, nous cherchons à retracer les effets de la séparation de phases depuis l’échelle moléculaire jusqu’à l’échelle de l’organisme entier, en incluant les conséquences phénotypiques chez les mutants végétaux. Cette recherche apportera des connaissances clés sur la régulation génique dépendante de la température et sur l’adaptation des plantes à un climat en réchauffement.
Figure 2: Schéma de la formation des condensats d’ELF3 en fonction de l’élévation de la température.
ELF3 forme de grands oligomères en solution, et une augmentation de la température déclenche la condensation de ces oligomères en gouttelettes liquides, in vitro et in vivo. Cette activité dépend du domaine de type prion (PrLD) d’ELF3.
Contributions aux Méthodes et Protocoles pour la Communauté Scientifique
Le développement méthodologique est un axe central de notre équipe, moteur d’innovation en biologie structurale, biophysique et approches computationnelles. Au cours des cinq dernières années, nous avons publié plus d'une dizaine d'avancées méthodologiques, incluant des techniques affinées de diffusion des rayons X aux petits angles (SAXS), en collaboration avec le Dr Mark Tully (European Synchrotron Radiation Facility, ESRF), des protocoles optimisés de purification par affinité à l’ADN suivie de séquençage, en partenariat avec l'équipe Floral Regulators, ainsi que de nouveaux tests de band shift pour étudier l'effet de la température sur les interactions entre complexes transcriptionnels et ADN in vitro.
© C. Morel / CNRS
Par ailleurs, nous avons développé des protocoles améliorés de FRAP (fluorescence recovery after photobleaching), permettant une analyse précise des gouttelettes liquides et des dynamiques de séparation de phases.
Plus récemment, en collaboration avec le Dr Max Nanao à l’ESRF, nous avons appliqué des approches de prédiction structurale basées sur l’intelligence artificielle, notamment AlphaFold, pour modéliser des complexes protéiques multimériques. En intégrant des données expérimentales issues de systèmes yeast two-hybrid et de spectrométrie de masse, nous avons amélioré la précision des prédictions de formation de complexes, ouvrant de nouvelles perspectives pour la compréhension des interactions protéine-protéine.
Ces avancées méthodologiques renforcent non seulement notre propre recherche, mais offrent également des outils précieux à la communauté scientifique, repoussant les frontières de la biologie moléculaire végétale.