La machinerie de fabrication des protéines à partir de l’ADN est finement régulée. Activer ou maintenir inactif le bon gène au moment opportun est vital pour un organisme vivant. Chez la plante par exemple, quand et comment choisir les gènes nécessaires à la production des racines, ou de la tige ou des feuilles ? «
Des co-répresseurs participent à éviter l’activation de gènes au mauvais moment, explique François Parcy, responsable de l'équipe Régulateurs du développement de la fleur.
Ils permettent de faire un lien physique entre d’autres acteurs de la régulation – les facteurs de transcription – et des protéines de remodelage de la pelote d’ADN. » Cette pelote, appelée chromatine, est décompactée pour permettre l’accessibilité aux gènes et parfois maintenue sous une forme dense lorsque les gènes sont silencieux.
Nous avons caractérisé la structure et la fonction d’un de ces co-répresseurs, appelé TOPLESS. Ce dernier est le membre fondateur d’une petite famille de co-répresseurs unique aux plantes et impliquée dans de nombreuses voies de signalisation essentielles pour le développement des plantes et leur réponse au stress. Son inactivation chez la plante modèle
Arabidopsis thaliana induit la formation d’une plante où la tige est remplacée par une racine (ce qui a inspiré le nom de TOPLESS pour le mutant correspondant).
Plus exactement, nous avons analysé, en collaboration avec nos collègues de l'ENS de Lyon et de l'EMBL, la partie de la protéine TOPLESS permettant l’interaction avec ses partenaires protéiques. Nous avons découvert une structure similaire à celle de la protéine du riz et que l’on retrouve même chez les algues. Nous avons ainsi montré que la capacité d’interaction est maintenue isolée chez une algue, démontrant ainsi l’ancienneté de cette fonction primordiale. «
La comparaison de la structure de TOPLESS avec des co-répresseurs animaux a de plus mis en évidence que ces différents co-répresseurs sont constitués de domaines quasi-identiques mais assemblés de façons différentes, précise François Parcy.
Cette étude fournit ainsi un bel exemple de ce que le Prix Nobel François Jacob avait appelé le bricolage de l’évolution dans la construction de la fonction des protéines. L’étude fournit également des clés pour une manipulation de cette fonction essentielle pour les réponses aux stress environnementaux et pour améliorer le potentiel adaptatif des plantes cultivées. » Cela pourrait permettre aux plantes de ne pas se retrouver toutes nues, racines à l’air et sans tige, à cause d’un stress !
Structure tridimensionnelle de la protéine TOPLESS.
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