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Fait marquant

Arabidopsis thaliana, une plante modèle pour l’étude de la détoxication métallique


Dans le but de mettre en place des stratégies de dépollution des sols contaminés par l’utilisation de plantes, nous avons entrepris une étude d'Arabidopsis thaliana faisant notamment appel à des approches globales de transcriptomique, de protéomique et de métabolomique couplées à des approches plus ciblées de génétique, de biochimie classique et de bioinformatique.

Publié le 6 mai 2008

La contamination des sols et des eaux par les métaux lourds constitue un risque pour la santé humaine. Parmi ces polluants, le cadmium (Cd) est un métal lourd largement répandu dans l’environnement par les activités anthropiques. Afin de mettre en place des stratégies de phytoremédiation (dépollution des sols contaminés par l’utilisation des plantes) une meilleure compréhension de la réponse de la plante à ces métaux est nécessaire. Dans cette optique, nous avons entrepris une étude intégrée faisant notamment appel à des approches globales de transcriptomique, de protéomique et de métabolomique couplées à des approches plus ciblées de génétique, de biochimie classique et de bioinformatique.

Arabidopsis thaliana fait partie des espèces modèles utilisées pour les études de génétique et de génomique fonctionnelle. Du fait de sa petite taille, cette plante ne nécessite qu’une infrastructure légère pour sa culture en laboratoire. Son cycle de reproduction de 6 semaines de la germination à la graine mature est très court et une grande collection de mutants est disponible. Enfin, la totalité du génome de cette plante a été séquencé. Il présente une taille de 125 M de paires de bases et est composé d’environ 27000 gènes.

L’étude que nous avons réalisé a porté, dans un premier temps, sur l’analyse de l’influence du milieu de culture (MS et GB5, Figure 1) sur le protéome des cellules d’Arabidopsis thaliana puis sur l’effet de différentes concentrations de cadmium sur ces cellules. Les analyses protéomiques différentielles ont permis de visualiser et de quantifier les variations d’expression des protéines séparées sur gels d’électrophorèse bidimensionnelle. L’identification de plusieurs centaines de protéines, réalisée par spectrométrie de masse (MALDI-TOF-MS et/ou nanoLC-MS/MS en collaboration avecl'équipe EDyP du laboratoire Biologie à Grande Échelle de notre institut) a permis d’établir une cartographie du protéome soluble d’Arabidopsis thaliana et de mettre en évidence l’influence du milieu sur l’expression des protéines notamment impliquées dans le métabolisme de l’azote et du soufre [1]. L’étude protéomique différentielle, en présence ou non de Cd, a permis de préciser la nature des perturbations entraînées par ce stress métallique et d’observer des inductions d’enzymes impliquées dans des voies métaboliques stratégiques (Figure 1) [2].


Figure 1 : Analyse protéomique de la réponse de cellules d’Arabidopsis thaliana à un stress cadmium par utilisation de gels d’électrophorèse bidimensionnels.
Les cellules d’Arabidopsis sont exposées à différentes concentrations de cadmium. Quatre gels 2D sont représentés correspondant à des cellules exposées en présence de cadmium. Parmi les protéines induites, 3 sont visualisées (deux glutathion-S-transférases (A et C), dihydrolipoamide déshydrogénase (B).
MS = Milieu de culture Murashige et Skoog
GB5 = Milieu Gamborg


Il semble que face à ce stress métallique la cellule végétale réagit en détournant le flux de molécules carbonées, azotées et soufrées vers la synthèse d’acides aminés entrant dans la composition du glutathion (Figure 2). Ce glutathion, tripeptide essentiel dans la vie de la cellule et jouant un rôle essentiel dans la lutte contre le stress oxydant, est ensuite utilisé pour la synthèse de phytochélatines, impliquées dans la chélation du toxique (Figure 2). Des analyses d’expression génique ont permis de montrer que certains des gènes impliqués dans ces voies métaboliques étaient régulés par le cadmium au niveau transcriptionnel [2].
Afin de caractériser les modifications qualitatives et quantitatives de métabolites induits par le stress métallique, les chercheurs ont initié des analyses de profils métaboliques de cellules stressées ou non grâce à l’utilisation de la spectrométrie de masse (LC-MS/MS) [en collaboration avec le LEMM de Saclay] [2]. Ces études ont consisté à étudier les répercussions de différentes concentrations de Cd sur les cellules d’Arabidopsis en analysant les pools de métabolites qu’elles contiennent. Les plus grandes modifications observées proviennent du fait que les cellules d’Arabidopsis ont induit la synthèse de nombreuses familles de phytochélatines (Figure 2) [2-4] qui, par l’intermédiaire d’un transporteur encore inconnu, véhiculent le Cd et d’autres métaux dans la vacuole. Ceci constitue un moyen de détoxication très efficace mis en place par la plante pour lutter contre un excès de métaux lourds.


Figure 2 : Voie de biosynthèse du glutathion et des phytochélatines impliquées dans la chélatation et le stockage du cadmium dans la vacuole.
Parce que la vacuole joue un rôle important dans la détoxication des métaux lourds et des xénobiotiques (herbicides…), une analyse protéomique de cet organite a été réalisée par l’équipe et en collaboration avec l'équipe EDyP du laboratoire Biologie à Grande Échelle de notre institut [6].


Ces résultats suggèrent également que la production de ces molécules, à concentrations élevées de Cd, serait limitée par la réaction catalysée par la glutathion synthase (GSH2). Cette limitation ne semble pas être la conséquence d’un manque d’enzyme mais d’un manque de disponibilité d’un des substrats de GSH2 : la glycine [2, 3].

Les travaux réalisés plus récemment par l’équipe ont également permis de mettre en évidence et de caractériser une nouvelle famille de protéines : les Selenium Binding Proteins comme étant de nouveaux acteurs cellulaires de la détoxication métallique [5].

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