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Aditya Nayak

Mécanismes moléculaires de la perception de la température ambiante chez les plantes

Publié le 28 mars 2019
Thèse soutenue le 28 mars 2019 pour obtenir le grade de docteur de la Communauté Université Grenoble Alpes - Spécialité : Chimie et Science du vivant

Résumé :
Le Complex Evening (EC, Evening complex) est composé de trois protéines : EARLY FLOWERING 3 (ELF3), ELF4 et LUX ARRYTHMO (LUX). Ce complexe est un composant clé de l'horloge circadienne de la plante et un important régulateur de gènes impliqués dans la croissance de la plante en réponse à la température, comme PHYTOCHROME INTERACTING FACTEUR 4 (PIF4) notamment. Des études ont montré que l'activité de ce complexe dépend de la température, avec une activité répressive qui augmente à des températures plus basses. Pour autant les mécanismes moléculaires impliqués dans la formation du complexe EC, dans sa liaison à l'ADN et son activité thermosensible étaient encore très mal compris. Une série d'expériences structurales in vitro, et in planta ont été réalisées afin de mieux comprendre l’ensemble de ces mécanismes moléculaires.

Pour cela, les trois protéines recombinantes du « EC » ont été produites et purifiées jusqu'à homogénéité. Ces protéines ont été utilisées pour reconstituer le complexe in vitro et pour étudier son activité de liaison à l'ADN. Le rôle des trois protéines dans la formation et l'activité du complexe ont été déterminé. LUX est nécessaire à la liaison à l'ADN via son domaine MYB, et cible le EC vers ses sites de liaison. ELF3 agit comme un échafaudage pour la formation du EC en liant à la fois LUX et ELF3. Cependant, le complexe LUX-ELF3 ne se lie pas avec une haute affinité à l'ADN. ELF4 est nécessaire pour rétablir la liaison de l'ADN au complexe. Pour explorer davantage les déterminants de la spécificité de liaison à l'ADN, le domaine de liaison à l'ADN (DBD) de LUX a été exprimé, purifié et cristallisé. La structure cristalline de LUX DBD en complexe avec deux oligonucléotides d'ADN différents, révèle les acides aminés critiques pour la liaison à l’ADN. La majorité de ces résidus entrent en contact avec le sillon principal de l’ADN et font partie d'un motif spécifique à la plante SH (A / L) QK (F / Y). De plus, un résidu d'arginine (Arg146) dans la région flexible N-terminale de la protéine joue un rôle important avec des contacts dans le sillon mineur de l’ADN. Sur la base de ces études structurales, une mutation de l'arginine en alanine (R146A) a été réalisée. Cette mutation diminue l’affinité de liaison à l'ADN mais conserve la spécificité déterminée in vitro par des expériences de gels de retard en comparaison avec la protéine de type sauvage. Des expériences transgéniques ont été utilisées pour déterminer l'effet de la mutation R146A chez la plante. Comme prévu, cette mutation a abouti à un phénotype intermédiaire entre le type sauvage et un mutant « knock out » du EC. Ceci suggère qu'en modifiant l'affinité de LUX pour sa liaison à l'ADN, l'activité de la totalité du EC peut être ajustée dans la plante. L’expression de PIF4 chez le mutant R146A est plus élevée que chez le sauvage mais moins affectés que chez le mutant lux, ce qui confirme la diminution de l'activité répressive du EC par la mutation R146A de LUX.

Pour explorer plus en profondeur la régulation du gène PIF4, la technologie CRISPR-Cas9 a été utilisée pour cibler différents éléments cis de son promoteur, notamment le site de liaison de LUX (LBS) et un élément qui s’appelle une « G-box » . Ces mutations ont entraîné des effets opposés sur la croissance des plantes et leur réponse à la température. Le mutant dans le LBS présente des hypocotyles allongés et un phénotype de floraison précoce à 22 ° C par rapport au sauvage, alors que le mutant de « G-box » entraine un raccourcissement des hypocotyles et une floraison tardive à 27 ° C par rapport au sauvage. Cela suggère qu'une modification des éléments cis dans le promoteur de PIF4 pourrait être un moyen de reprogrammer la croissance des plantes et leur réponse à la température.

Ces résultats fournissent différentes stratégies pour influer sur la croissance des plantes sous différents régimes de température ambiante sans contrainte de stress, que ce soit par l'ingénierie des protéines basée sur la structure, comme indiqué pour la mutation LUX R146A ou par l'édition génomique d'éléments de régulation spécifiques connus pour affecter la croissance et la réponse à la température tels que LBS et G-box dans le promoteur de PIF4. Avec l’augmentation des températures due au changement climatique et à ses effets néfastes sur la productivité des plantes, la capacité de modifier de manière prévisible la croissance des plantes et leur réponse à la température constituent un moyen intéressant de relever ce défi mondial. Ces résultats constituent une base potentielle pour de futures applications en bio-ingénierie d'espèces cultivées.

Jury :
Président : Monsieur Marc Jamin
Rapporteur : Monsieur Gregory Vert
Rapporteur : Monsieur Richard Immink
Examinateur : Monsieur Cyril Boyault
Examinateur : Monsieur Philip Wigge
Directrice de thèse : Madame Chloe Zubieta

Thèse en ligne.